Technopol Mix 080 | Same O
Nantais d’origine, Same O est un DJ et producteur désormais basé à Paris. Enchaînant les tracks avec une précision chirurgicale, cet amoureux des styles UK se laisse influencer par une multitude de genres. Techno, Tribe, Break… sa transgression des styles et des rythmes lui confère une patte unique. Déjà fier de plusieurs sorties sur des labels tels qu’International Chrome, Jerry Horny, Crazed Behaviour ou 44Tours, Same O est une pépite à surveiller de près.
Outre la musique, as-tu d’autres intérêts et passions ? Comment te trouves-tu et te déconnectes-tu ?
La musique est sincèrement ma première source d’émotions au quotidien, c’est ce qui alimente toutes mes journées, mes trajets et ça transforme ma vision de certains moments clefs de ma vie. J’aime aussi beaucoup retrouver ces sensations de rythmes et de tonalités dans des sons du quotidien, typiquement, les rythmes dans les chutes d’objets, dans le trafic, ou la musique dans les façon de parler des gens. Je crois que je suis passionné de son globalement, c’est pour ça que j’adore aussi le cinéma. Je me retrouve dans les films de Lanthimos ou de Coppola, leur vision du rythme fait complètement écho à ma musique. Pour moi la déconnexion se fait par l’arrêt des réseaux dans un premier temps et puis ensuite être proche de mon entourage, de mes animaux…
Que penses-tu de la nouvelle scène électronique qui apparaît aujourd’hui ?
Je trouve qu’elle s’embellit de jour en jour, on a des propositions ultra fraîches et précises tous les jours ! La Techno, le Break, la Bass music, ça s’est vraiment démocratisé ces dernières années et sous une multitude de formes. Beaucoup de gens se mettent à produire et très rapidement, arrivent sur la scène avec des morceaux solides, super bien produits. Je suis vraiment heureux de voir que les acteur·rices de la musique électronique sont de plus en plus nombreux·ses, et que ça devient accessible. Les collectifs comme Minuit Rapide, Matière ou les orga du Fata Morgana sont dans cette démarche en France. En Angleterre, tu retrouves Keep Hush, qui pousse fort la scène vers le haut, c’est gigantesque. Au final, tous ces collectifs permettent aussi aux producteur·rices de s’inspirer de nouvelles sonorités, donc ils jouent un rôle très crucial dans la scène. Ce qui me rassure aussi c’est de voir qu’avec la montée de l’extrême-droite, la scène se mobilise vraiment pour résister, militer, sensibiliser et puis se battre, tout simplement. Le Front Électronique et sa compilation Siamo Tutti Antifascisti vol.1 montre un réel engagement et une prise de position forte. Je suis fier de faire partie de cette scène quand je vois ça, et je me sens redevable aussi dans un sens. Il y a beaucoup de sujets qui ne sont pas encore au point sur l’inclusivité, la parité, les VSS, on ne peut pas l’occulter, c’est bien trop présent dans notre milieu, mais cette mobilisation m’a beaucoup touché.
Quel est ton processus artistique lorsque tu produis de la musique ?
Sur les dernières productions que j’ai créées, j’ai essayé de commencer par des mélanges “inattendus” disons. J’ai vraiment essayé de créer des points de convergences entre différents styles, car c’est ce que je fais dans mes mix généralement. Donc je pars toujours de sessions où j’écoute les dernières sorties qui m’inspirent, celles où il y a quelque chose que je ne comprends pas, ou qui me donne la skank face ahaha. Sur l’EP que je finis en ce moment, je suis parti de samples de Bass, de Dubstep et de Break par exemple, pour les mélanger avec des rythmes Jersey et des claps sur les 2ème temps. Ça donne des formes de polyrythmies et d’anomalies qui parfois fonctionnent super bien. On joue sur des BPM différents en parallèle et ça donne des phrasés très musicaux dans la rythmique. Et puis aussi j’adore infuser mes tracks avec des inspirations drum’n’bass, dans le choix de rimshots ultra incisifs à la place de claps, ou avec des shuffles bien sentis. Des fois c’est pas grand chose mais c’est juste ce qu’il faut pour redonner l’accélération dont la track a besoin. Dans mes productions, c’est un peu bateau mais je cherche à raconter une histoire de A à Z : j’essaye d’avoir des arrangements bien ficelés, avec des ponts très abstraits, immersifs, avec plein de FX qui arrivent un peu comme des respirations successives. Je passe beaucoup de temps sur l’arrangement, pour éviter les longueurs, les redites. Je remets tout en question, pour être sûr de moi à la fin, pour être certain d’avoir essayé tout ce que je voulais et puis d’avoir fait les bons choix. Après, quand je sens que je me prends trop la tête, j’arrête et je passe à un autre projet où je suis plus spontané. J’essaye d’abord de me raconter moi, d’apprendre à me connaître puis de retranscrire tout ça de façon compréhensible par les autres.
Dans tes productions et tes sets, qu’essayes-tu de transmettre à ton public ?
Sur scène, je cherche toujours à emmener les gens dans des endroits qu’ils/elles n’attendent pas, je joue un peu sur le “Never let them know your next move”. C’est pas toujours le cas, ça dépend vraiment du public et du contexte, mais si je sens que je peux y aller, je me lance. J’essaye de leur montrer que je suis avec eux/elles et qu’ils/elles ont un rôle à jouer dans un DJ set. Puis, j’essaye de montrer que certaines tracks, qu’on pourrait penser pas du tout faites pour le club, peuvent complètement l’être ! Au-delà de ça, j’essaye de faire en sorte que les gens passent par plein d’émotions, plein d’ambiances, j’ai envie que ça génère des souvenirs. Il y a des labels qui m’aident vraiment à faire ça, je pense au label islandais bbbbbb recors, TraTraTrax ou NAAFI qui, avec leurs releases juste explosives, permettent aux DJs de sortir des sentiers battus.
Qu’as-tu préparé pour ce podcast ? Peux-tu nous parler un peu de ta sélection ?
Sur ce podcast, j’ai été complètement spontané. J’ai parfois envie de préparer vraiment en amont mes sets, mais c’est vrai qu’on peut perdre la magie de l’instant T. J’ai donc vraiment essayé de jouer ce qui me plaît à fond en direct et je me suis laissé porter par le moment. J’ai inclus des passages trancy, car je n’en joue pas beaucoup habituellement, et des tracks très anglaises qui s’inspirent du break et de l’électro. J’ai aussi joué des unreleased de mon prochain EP sur la fin !
Quels sont tes projets à venir ?
J’ai un EP de 4 ou 5 titres en confection, où je suis allé chercher mon identité très en profondeur. On est très orienté club avec des influences UK ou Jersey. La production devrait se finir dans l’été pour arriver en bombe à la rentrée ! Je bosse aussi sur des collabs en parallèle avec Orchid, Swooh ou Tina Tornade. Puis, on est en train de créer un duo avec Tina Tornade, on a rejoué ensemble récemment sur un after au Glazart et l’alchimie nous a grave donné envie de pousser ce projet plus loin. On a envie de produire, de jouer et de créer ensemble. Donc hâte de vous présenter tout ça !