Tribune «Faisons de la culture, du clubbing et de la fête une activité plus responsable»
À l’heure où le secteur événementiel est en stand-by, dans l’attente de nouvelles positives pour reprendre peu à peu son activité, une question se pose chez de nombreux acteurs : comment sera la fête de demain ? La crise du covid-19 annonce un changement où solidarité, écologie et partage en seront peut-être les piliers fondateurs. Kevin Ringeval, membre du conseil d’administration Technopol, fondateur des nuits 3672* et ex co-fondateur de L’Aérosol, s’exprime sur le sujet à travers la tribune ci-dessous.
Dans la crise profonde que nous traversons, c’est sans doute sur son axe éthique que notre vie est la plus bousculée. La pertinence de nos choix est devenue une question centrale, sur les plans individuels comme collectifs. Cette période est une occasion unique d’opérer une véritable transition écologique dans le monde de la fête, de la nuit et plus généralement dans le SPECTACLE VIVANT. En toute situation de crise une nouvelle vision s’impose !
Si la France est un pays qui rayonne sur le plan culturel, nous ne pouvons que constater que l’éco-responsabilité est peu prise en compte par les acteurs de la filière et que la notion d’engagement et de mutualisation pour un secteur plus vertueux est bien souvent mis de côté, victime d’une logique capitaliste, que le système a fini par gagner.
À l’instar des choix engagés dans d’autres secteurs pour le climat dans différents domaines (le transport, l’urbanisme…), le grand défi est de prendre les engagements nécessaires dans le domaine culturel et pour le secteur de la fête électronique. Consommer moins et donc réduire l’empreinte écologique habituellement très forte dans le domaine de l’évènementiel (festivals, clubbing…), dégager des pistes et des ambitions écologiques permettrait aux acteurs culturels et festifs de tendre vers une transition zéro déchet, zéro carbone, respectueuse des conditions de travail, d’une diversité artistique, etc…
Faisons de la culture, du clubbing, de la fête une activité plus responsable, à même de sensibiliser les fêtards aux grands enjeux écolos. Le monde de demain devra prendre en compte le besoin d’une production artistique locale, française et européenne, générant par là même une explosion des offres d’emploi et un développement hors mondialisation plus respectueux de l’environnement et construit sur l’engagement.
Que les artistes, les acteurs aient de nouveaux un propos, un discours, c’est ce que nous attendons. Il n’est PLUS ringard d’avoir des positions, des idées… Vos voix sont importantes et nous avons besoin de vous dans cette GUERRE pour le retour de l’intelligence. La culture doit parler de révolte anti-autoritaire, il doit y avoir une renaissance marquée par un réinvestissement politique de la classe culturelle contre un néolibéralisme qui écrase sans cesse une créativité libre !
Nous voulons pour demain une politique culturelle volontariste, à l’écoute des spécificités de notre secteur et consciente de la diversité des modes de fonctionnement des acteurs. Plus jamais nous ne voulons faire face à des attaques aussi graves que celles portées à notre culture lors de la fête de la musique à Nantes, avec le décès de Steve en 2019. Pour cela, nous construirons demain avec vous et nourrirons vos réflexions, de manière à ce que vous préveniez l’ensemble de la chaîne de décision de nos exigences et de notre volonté de célébrer le vivant dans les années à venir !
Dans le monde que nous construirons demain ensemble, nous vous voulons à l’écoute des mutations sociales et conjointement nous participerons à gagner cette guerre, avec pour armes la rencontre, la diversité, le partage, la joie. Demain nous vous aiderons, monsieur le ministre de la Culture, à répartir plus vertueusement et plus écologiquement les moyens que nous vous donnons. Vous pouvez compter sur nous.
Nous lisons les mêmes livres, regardons les mêmes films, les mêmes streaming culturels de nos salons, nous nous éduquons collectivement à distance afin de continuer de faire société ! La culture nous unit, elle est le lien qui nous rapproche, même en situation de confinement. Demain nous allons de nouveau physiquement nous retrouver ensemble « pour de vrai », sortir du repli sur soi, dépasser nos nouvelles peurs, combattre les grands acteurs « culturels » du web pour qui le confinement à vie peut être une aubaine économique. La culture vivante est un écosystème fragile, sensible, que nous devons protéger afin qu’il continue de faire son œuvre : fabriquer des souvenirs, de la vie, de l’humanité !
C’est dans l’idée d’une convergence des luttes que j’invite l’ensemble des acteurs du monde de la nuit, de la fête dans sa diversité la plus totale, avec l’appui indispensable du public, à prendre part et réfléchir dès maintenant à la naissance d’une CONTRE CULTURE ORGANISÉE et ÉCOLOGIQUE et en ordre de combat. Pour une fête consciente de son pouvoir, et de celui à mettre au service de la planète dès aujourd’hui !