Le numéro 23 : emblème de la culture free party et de la résistance underground

Il était une fois… La tecktonik, le thérémine, le voguing, la drum&bass, la vie des cultures électroniques. Vous connaissiez leur nom mais pas leur histoire. Travail d’investigation et de décryptage, Technopol vous fait revivre les courants, les genres, les événements, les machines, et les mouvements qui ont façonné la culture que nous connaissons aujourd’hui. 

Le mystique numéro 23 est devenu un symbole important de la culture free party, une sous-culture de la musique électronique underground caractérisée par des événements de musique spontanés et non commerciaux. Ces événements sont organisés clandestinement dans des endroits inhabituels et souvent secrets tels que des champs, des forêts et des entrepôts abandonnés, et attirent une foule diversifiée de passionné·e·s de musique électronique. Cette culture est née dans les années 80 et 90 en Europe, en réponse à la réglementation croissante de la musique électronique et à la fermeture des clubs et des lieux de musique alternatifs.

L’utilisation du numéro 23 a tout d’abord été introduite par Spiral Tribe, un collectif de musique électronique et sound system originaire de Londres, en Angleterre, créé en 1990. Le collectif est composé de DJs, de producteur·ice·s de musique, d’artistes et d’activistes partageant une vision commune de la musique électronique et de la culture underground. Spiral Tribe est surtout connu pour avoir été l’un des pionniers de la culture free party en Europe. Le collectif a organisé des free parties en utilisant leur propre sound system capable de fournir des basses et des sons puissants afin de créer une expérience musicale immersive.

Cependant à cette époque, les autorités étaient très hostiles à la musique électronique et les free parties étaient souvent organisées clandestinement, sans autorisation, ce qui les rendait vulnérables aux saisies de matériel et aux arrestations. Pour éviter cela, Spiral Tribe a commencé à utiliser des symboles discrets pour communiquer l’emplacement des événements aux participant·e·s. Le système de codage numérique utilisé pour communiquer l’emplacement des free parties était basé sur l’utilisation de chiffres pour représenter des lettres. Par exemple, le chiffre 1 pouvait représenter la lettre A, le chiffre 2 pouvait représenter la lettre B, et ainsi de suite. En utilisant ce système, le chiffre 23 représentait la lettre W, qui signifiait « week-end ». Ainsi, les participant·e·s à une free party pouvaient savoir où se déroulait l’événement en cherchant les symboles 23 ou W sur les murs, les panneaux ou les flyers. De plus, le numéro 23 avait une signification mystique pour certains membres de Spiral Tribe. Selon eux·elles, le nombre 23 représentait l’harmonie et l’équilibre entre le masculin et le féminin, ainsi que la force et l’énergie spirituelle.

Depuis lors, ce symbole est devenu très populaire parmi les participant·e·s aux free parties et a commencé à apparaître partout dans les événements de la culture free party. On pouvait le trouver sur les vêtements, les tatouages, les stickers, les flyers et même les systèmes de sonorisation des sound systems.

 

L’archétype de la contre-culture

Le numéro 23 est également devenu un symbole de résistance contre la répression de la musique électronique et de la culture underground. En 1992, Spiral Tribe a été arrêté et son matériel saisi lors d’une free party à Castlemorton en Angleterre. Cette arrestation a entraîné une manifestation de plus de 20 000 personnes à Londres pour défendre la liberté de la musique électronique. Les manifestant·e·s portaient des t-shirts avec le symbole du numéro 23 pour montrer leur soutien à Spiral Tribe et à la culture free party.

Free party Spiral Tribe à Castlemorton, Angleterre (1992). Crédit photo : Alan Lodge.

En France, le numéro 23 a également été utilisé comme symbole de résistance lors des manifestations contre la loi travail en 2016. Les manifestant·e·s ont créé des autocollants portant le numéro 23 pour exprimer leur opposition à la loi et leur solidarité avec la culture free party.

Spiral Tribe a également popularisé l’utilisation du numéro 23 en dehors de la culture free party. En effet, le collectif a intégré ce chiffre dans son artwork, dans des titres de chansons et même dans des noms de projets. Le collectif a également sorti plusieurs vinyles sous le code générique SP23, qui est devenu synonyme de leur style musical unique et de leur engagement dans la culture underground, contribuant à renforcer l’association entre Spiral Tribe et le numéro 23. Enfin, le premier label fondé à Paris pour sortir leurs productions musicales s’appelait Network 23. Ce nom est lui-même présent dans l’un de leurs premiers morceaux, où un sample issu de la série Max Headroom déclare : « this is network 23, the network that means business now transmitting live to the world ».

 

L’histoire du symbole du numéro 23 dans la culture free party est finalement multifacette. Élément emblématique de la culture free party et du sound system Spiral Tribe, il représente l’histoire de la contre-culture et de la résistance, ainsi que l’importance de la communication et du codage dans la culture underground. Considéré comme un symbole important ou non, il est indéniable qu’il a joué un rôle important dans l’histoire de la culture free party. En tant que symbole de la liberté, de la résistance et de la contre-culture, le numéro 23 continue d’inspirer les passionné·e·s de musique électronique underground à travers le monde.
 

Article écrit par Loisse Moine

Photo de couverture ©Guillaume Kosmicki

 


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